Equipe Transduction Moléculaire & Supramoléculaire (TMS)

TMS

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Dans une démarche de design moléculaire, l’équipe TMS prend en compte l’état actif des entités fonctionnelles organiques ou inorganiques (état natif/fondamental versus état réduit/oxydé ou photo-excité) pour en maîtriser la réactivité : transferts hétérogènes et homogènes (photo-induits) d’électrons et transferts d’énergie électronique. Cette activité de recherche, visant à convertir, stocker et utiliser l’énergie lumineuse, s’inscrit dans les cadres thématiques connexes de la photosynthèse artificielle (transduction de l’énergie solaire) et de la photochimie bio-inorganique (par ex. la thérapie photodynamique).

 

Membres : Philippe P. Lainé (DR-CNRS, responsable de l’équipe), Gilles Lemercier (Pr), Mustapha Dahmane (IE-HC), Sébastien Bellynck (IE).

 

TMS : le but et la méthode.

La transduction moléculaire & supramoléculaire développée par l’équipe intéresse les domaines de l’énergie, de l’information et de la santé. Par son activité de recherche, l’équipe a clairement vocation à contribuer aux efforts menés dans l’atteinte, à terme, de plusieurs des objectifs de développement durable (ODD) tels que définis par l’ONU en 2015, et en particulier celui « d’une énergie propre et d’un coût abordable » (ODD No 7). Dans ce cadre, l’équipe TMS réalise un travail de « design » moléculaire, se consacrant à la mise en évidence de nouveaux paradigmes (relations structure-propriété) fonctionnels, par la proposition conceptuelle et l’élaboration (synthèse) de prototypes moléculaires, c’est-à-dire des assemblages organiques et inorganiques à l’échelle (supra-)moléculaire. Pour établir la pertinence fonctionnelle de ces démonstrateurs, ces derniers sont ensuite étudiés de manière approfondie et leurs comportements analysés en collaboration avec des experts du domaine dont ils relèvent (photo-physique/chimie et/ou électrochimie, essentiellement). Parallèlement à ces investigations physico-chimiques, les candidats moléculaires font systématiquement l’objet d’une modélisation avancée menée par des spécialistes de la chimie théorique. La combinaison de ces deux approches complémentaires, expérimentale et théorique, permet in fine l’établissement de mécanismes réactionnels ouvrant la voie à l’amélioration des caractéristiques fonctionnelles des prototypes moléculaires.

Les champs investis sont ceux des propriétés électro-chimiques (recherche de super-électrophores), des propriétés d’absorption électronique linéaire et non-linéaire (recherche de super-chromophores & « NLO-phores » originaux) et des propriétés photo-physiques/chimiques (recherche de photosensibilisateurs innovants). Dans notre démarche de design moléculaire nous prenons en compte l’état actif des entités fonctionnelles (état natif/fondamental versus état réduit/oxydé ou photo-excité) pour en maîtriser la réactivité : transferts hétérogènes et homogènes (photo-induits) d’électrons et transferts d’énergie électronique. Cette activité de recherche, visant à convertir, stocker et utiliser l’énergie lumineuse, s’inscrit dans les cadres thématiques connexes de la photosynthèse artificielle (conversion, stockage et transduction de l’énergie solaire) et de la photochimie bio-inorganique (e.g. thérapie photodynamique, « PDT »).

En résumé : Le « design moléculaire » (chimie moléculaire de synthèse) est à l’initiative pour proposer des assemblages fonctionnels. En collaboration, l’expertise physico-chimique ainsi que la modélisation moléculaire théorique évaluent les performances des prototypes proposés tout en contribuant à la rationalisation de leurs comportements (établissement des mécanismes réactionnels).

 

Transduction de l’Énergie Solaire – Photosynthèse Artificielle / PI : Philippe P. LAINÉ

Par le passé, et durant des années, nous avons contribué à l’exploration de différents aspects de la conversion de l’énergie solaire : essentiellement la « séparation de charges photo-induite » (approche bio-mimétique / Photochimie Supramoléculaire, telle que conceptualisée par V. Balzani) mais aussi le photovoltaïque à base de colorants (approche technologique / « Dye-sensitized Solar Cells, DSSCs », telle que conceptualisée par M. Grätzel). Ces travaux visaient à accroître les connaissances en ces domaines qui, fondamentalement, reposent sur des processus à « 1-photon / 1-électron ».[PL / page perso]

Depuis une dizaine d’années, notre activité s’est infléchie afin (i) de prendre en compte les contraintes de durabilité appliquées aux assemblages fonctionnels proposés, telles que spécifiées dans le cadre de la réalisation de l’ODD No 7 et (ii), de procéder au rapprochement des propositions conceptuelles d’objectifs opérationnels –voire applicatifs– intégrant de facto la dimension de l’innovation technologique durable (ODD No 9 : « Industrie, Innovation et Infrastructure »). Nous focalisons donc davantage notre attention sur les deux problématiques-clés de nature fondamentale, liées à la (photo-)catalyse redox et susceptibles de donner lieu à des retombées technologiques. Dans ce but, nous développons, entre autres, la chimie de plateformes cationiques purement organiques du type pyridinium et carbénium dits « étendus » (EPs & ECs ramifiés ou fusionnés ; voir Figure). Essentiellement –mais non exclusivement– ces espèces cationiques sont respectivement exploitées en tant qu’électrophores et chromophores/fluorophores.


Problématique No 1 (électrochimie) : « La fonction « Charge Pool » & l’inversion des potentiels électrochimiques »

La question posée est celle du couplage des processus à 1-photon / 1-électron avec la nécessaire maîtrise des phénomènes multi-photon/multi-électron pour réaliser in fine de la chimie, qui est un processus à 2n électrons (stockage de l’énergie dans les liaisons chimiques / « solar fuels »). C’est au niveau du catalyseur que ce couplage s’effectue. En effet, d’un point de vue fonctionnel, un catalyseur redox (moléculaire) peut être formellement décomposé en un « réservoir de charges (électrons, trous) », identifié à la fonction « Charge Pool » (« CP »), auquel sont associés des sites réactionnels de transformation rapide des substrats en produits lors de la délivrance coordonnée (synchrone) de 2n charges (en provenance du CP) à un potentiel électrochimique adéquat.

Notre contribution concerne la fonction élémentaire « CP » : le défi est de réaliser, à l’échelle moléculaire, le confinement de charges (plus spécifiquement des électrons) par leur accumulation ou leur stockage avec comme contrainte que la collection comme le relargage de ces électrons se fassent à potentiel constant, ce qui implique de s’affranchir des effets néfastes de la répulsion électrostatique. Notre stratégie repose sur la mise en œuvre du phénomène électrochimique d’inversion des potentiels (PI). Ce processus, peu commun, implique que le coût énergétique du second transfert mono-électronique (en réduction ou oxydation) est inférieur à celui du premier, ce qui se traduit en analyse électrochimique (typiquement en voltammétrie cyclique) par l’observation d’un transfert de deux électrons en une seule étape apparente (i.e., à un même potentiel), même si, fondamentalement, ces transferts hétérogènes d’électrons sont séquentiels.

Nous avons ainsi conçu et établi les deux nouveaux paradigmes électrochimiques suivants, « Expanded Bi-Pyridinium », EBP et « Structronique », STR (voir figures), qui permettent la gestion de deux électrons en une seule étape apparente (cas le plus simple, pour commencer !). Le paradigme EBP procède par accumulation de charges (processus électrochimiquement réversible) tandis que le paradigme STR procède par stockage des électrons dans une liaison C–C « réservoir » qui se crée lors de la réduction (charge) et se clive lors de son oxydation (décharge), correspondant à un processus électrochimiquement irréversible mais chimiquement réversible (ouverture d’un cycle d’hystérésis électrochimique).

Nous poursuivons actuellement notre effort pour concevoir de nouveaux paradigmes électrochimiques pour la fonction « Charge Pool », qui seront capables de gérer 2n électrons (avec n > 1) en une seule étape et à l’échelle moléculaire. Les retombées attendues de la fonction CP dépendent en grande partie de la typologie des comportements électrochimiques (réversibles ou non) des prototypes moléculaires. Les systèmes réversibles ont vocation à trouver des applications en tant qu’anolytes avancés dans des batteries à flux redox alors que les comportements irréversibles et hystérétiques sont davantage destinés (i) à la conception de nouveaux matériaux moléculaires redox-actifs entrant dans la composition de dispositifs de stockage d’énergie et (ii), au stockage, à l’échelle (uni-)moléculaire, de l’information (Électronique Moléculaire). D’une manière plus générale, la fonction CP a vocation à devenir un composant fonctionnel intégré aux « Photochemical Molecular Devices, PMDs » conceptualisés par V. Balzani (Photochimie Supramoléculaire) pour la réalisation, entre autres, d’une photosynthèse artificielle homogène.

Publications significatives :

Paradigme STR : (a) É. Brémond, M. Hromadová and P. P. Lainé*, The Structronic Concept: Harnessing Carbon–Carbon Chemical Bonding for Electron Storage and Related Applications, ChemElectroChem., (2025), 12, e202500037; DOI: 10.1002/celc.202500037. (b) E. Vaněčková, M. Dahmane, J. Forté, S. Cherraben, X.-Q. Pham, R. Sokolová, É. Brémond,* M. Hromadová* and P. P. Lainé*, Are Redox-active Centers Bridged by Saturated Flexible Linkers Systematically Electrochemically Independent? Angew. Chem. Int. Ed., (2024), 63, e202406299; DOI: 10.1002/anie.202406299. (c) M. Hromadová,* and P. P. Lainé*, Recent advances in electrochemistry of pyridinium-based electrophores: A structronic approach, Curr. Opin. Electrochem., (2022), 34, 100996; DOI: 10.1016/j.coelec.2022.100996. (d) A. Gosset, Š. Nováková Lachmanová, S. Cherraben, G. Bertho, J. Forté, C. Perruchot, H.-P. Jacquot de Rouville, L. Pospíšil, M. Hromadová,* E. Brémond* and P. P. Lainé*, On the Supra-LUMO Interaction: Case Study of a Sudden Change of Electronic Structure as a Functional Emergence, Chem. Eur. J., (2021), 27, 17889–17899; DOI: 10.1002/chem.202103136. (e) A. Gosset, L. Wilbraham, Š. Nováková Lachmanová, R. Sokolová, G. Dupeyre, F. Tuyèras, P. Ochsenbein, C. Perruchot, H.-P. Jacquot de Rouville, H. Randriamahazaka,* L. Pospíšil,* I. Ciofini,* M. Hromadová* and P. P. Lainé*, Electron Storage System Based on a Two-Way Inversion of Redox Potentials, J. Am. Chem. Soc., (2020), 142 (11), 5162−5176; DOI: 10.1021/jacs.9b12762.

Paradigme E(B)P : (a) Š. Lachmanová, G. Dupeyre, J. Tarábek, P. Ochsenbein, C. Perruchot, I. Ciofini,* M. Hromadová,* L. Pospíšil* and P. P. Lainé*, Kinetics of Multielectron Transfers and Redox-Induced Structural Changes in N-Aryl-Expanded Pyridiniums: Establishing Their Unusual, Versatile Electrophoric Activity, J. Am. Chem. Soc., (2015), 137 (35), 11349–11364; DOI: 10.1021/jacs.5b05545. (b) J. Fortage, C. Peltier, C. Perruchot, Y. Takemoto, Y. Teki, F. Bedioui, V. Marvaud, G. Dupeyre, L. Pospísil, C. Adamo, M. Hromadová,* I. Ciofini,* and P. P. Lainé*, Single-Step versus Stepwise Two-electron Reduction of Polyarylpyridiniums: Insights from the Steric Switching of Redox Potential Compression, J. Am. Chem. Soc., (2012), 134 (5), 2691–2705; DOI: 10.1021/ja210024y. (c) J. Fortage, C. Peltier, F. Nastasi, F. Puntoriero, F. Tuyèras, S. Griveau, F. Bedioui, C. Adamo, I. Ciofini,* S. Campagna,* and P. P. Lainé*, Designing Multifunctional Expanded Pyridiniums: Properties of Branched and Fused Head-to-Tail Bipyridiniums, J. Am. Chem. Soc., (2010), 132 (46), 16700–16713; DOI: 10.1021/ja108668h.

 

Problématique No 2 (photochimie) : « Développement de photosensibilisateurs purement organiques »

Le composé de coordination [Ru(bpy)3]2+ est certainement l’un des plus étudiés au monde et peut être considéré, en photochimie, à l’instar du méthyl viologène en électrochimie. Ces deux archétypes moléculaires ont d’ailleurs vu leurs histoires se mêler, en synergie, avec l’avènement de la photosynthèse artificielle dans son approche moderne initiée dans les années 1970.

Les atouts du [Ru(bpy)3]2+ sont notamment une grande robustesse (stabilité cinétique ou inertie), une forte absorption électronique dans le domaine visible et une photophysique riche (phosphorescence), qui ont ouvert la voie à une photochimie également d’une grande richesse. [Ru(bpy)3]2+ est en effet un photosensibilisateur très efficace capable d’initier, à partir de son état photo-excité de plus basse énergie (3[MLCT]*) et de longue durée de vie : (i) des transferts d’électrons, se comportant à la fois comme un donneur et un accepteur d’électron (« quenching » oxydant ou réducteur, respectivement) à des potentiels thermodynamiquement compatibles avec la réalisation de la fameuse réaction de décomposition (craquage) de l’eau en dihydrogène et dioxygène (« water splitting ») et (ii), un transfert d’énergie électronique (voir ci-dessous pour des applications en PDT). Pour autant, au regard des contraintes nouvelles (ODD No 7), il apparaît que ce composé photosensibilisateur, excellent pour les études académiques, souffre essentiellement de deux inconvénients : (i) une perte partielle de l’énergie collectée par absorption électronique, qui est liée à l’existence d’un croisement inter-système 1[MLCT]* → 3[MLCT]* quantitatif (effet « d’atome lourd ») et (ii), la nature semi-précieuse du ruthénium. De nos jours, il s’agit de concevoir des photosensibilisateurs performants, dotés d’une grande robustesse chimique (à l’état fondamental comme à l’état photo-excité), ne nécessitant qu’une ingénierie chimique minimale, constitués exclusivement d’éléments abondants et présentant des propriétés électroniques (chromophoriques) comme photo-physiques/chimiques pertinentes dans le cadre des prérequis pour la réalisation d’une photosynthèse artificielle. Ces critères relèvent également d’une démarche alignée avec les objectifs du « Sustainocène », que l’équipe TMS entend promouvoir.

Dans le cadre de notre exploration des propriétés électroniques et de luminescence d’une série de carbéniums étendus fusionnés et hydrosolubles (rôle du/des fragment(s) éthoxy-éthanol, EE), nous avons identifié la plateforme triazatriangulénium (TATA) comme candidat prometteur à la fonction de photosensibilisateur. La molécule cationique [TATA(EE)3]+ est un chromophore efficace dont le spectre d’absorption est similaire à celui de [Ru(bpy)3]2+, étant avantageusement –et légèrement– décalé vers le rouge, où l’énergie solaire disponible est plus abondante (voir figure ci-dessous). Dépourvu d’atome lourd dans sa composition, [TATA(EE)3]+ est un fluorophore efficace dont l’état excité émissif (c.-à-d. de plus basse énergie), 1[TATA]*, a une durée de vie longue pour un phénomène de désactivation radiative basé sur la fluorescence (une dizaine de nanosecondes). Cette caractéristique particulière rend possible l’engagement de l’état excité singulet dans un processus de transfert photo-induit et intermoléculaire d’électron suivant un mécanisme de « quenching » réducteur (l’état photo-promu de la molécule se comporte comme un accepteur d’électron exacerbé) conduisant à la formation du radical [TATA(EE)3]. À la différence de l’analogue fonctionnel [Ru(bpy)3]2+ dans son état photo-actif triplet à transfert de charge 3[MLCT]*, c’est-à-dire 3[RuIII(bpy)2(bpy•-)]*, transformé après « quenching » réducteur en [RuII(bpy)2(bpy•-)], l’espèce radicalaire [TATA(EE)3]est totalement délocalisée sur la plateforme TATA et non plus localisée sur l’un des trois ligands bpy, ce qui augmente d’autant sa stabilité et limite la dégradation du photosensibilisateur réduit PS•. Ce dernier transfert alors son électron au catalyseur (basé sur un cation métallique abondant) et après deux cycles catalytiques, permet la production de dihydrogène (« carburant solaire ») à partir de protons en milieu aqueux. Ces cycles catalytiques sont d’une grande efficacité, caractérisés par un « turnover number » remarquable et bien supérieur à ceux obtenus avec le [Ru(bpy)3]2+ de référence qui, en fait, se dégrade plus rapidement.

En collaboration avec l’équipe grenobloise EMPRE, nous travaillons actuellement (i) à tester le nouveau photosensibilisateur [TATA(EE)3]+ avec d’autres catalyseurs de la réduction des protons en dihydrogène et (ii), à améliorer les performances de ce photosensibilisateur par ingénierie moléculaire pour le rendre plus réducteur dans sa forme radicalaire active et ainsi accéder à la réduction d’autres substrats d’intérêt comme le CO2.

Publications significatives :

(a) R. Gueret, L. Poulard, M. Oshinowo, J. Chauvin, M. Dahmane, G. Dupeyre, P. P. Lainé,* J. Fortage* and M.-N. Collomb*, Challenging the [Ru(bpy)3]2+ photosensitizer with a triazatriangulenium robust organic dye for visible light-driven hydrogen production in water, ACS Catalysis (2018), 8, 3792–3802, DOI: 10.1021/acscatal.7b04000. (b) I. Barsuk, P. P. Lainé, F. Maurel and É. Brémond*, Triangulenium Dyes: the Comprehensive Photo-Absorption and Emission Story of a Versatile Family of Chromophores, Phys. Chem. Chem. Phys., (2020), 22 (36), 20673−20684, DOI: 10.1039/d0cp02990d.

 

Commentaire : « Photosynthèse homogène versus hétérogène »

Nous distinguons les problématiques de la photosynthèse artificielle dite « homogène » (à base (supra-)moléculaire), telle que présentée ci-dessus, de celle dite « hétérogène » (à base de nanoparticules, semiconducteurs, électrodes etc..). L’approche hétérogène résout de facto quatre problématiques limitantes que rencontre l’approche homogène : (i) l’accumulation de charges pour la réalisation d’une catalyse rédox en raison de la dimensionalité non moléculaire des éléments fonctionnels (aspect cinétique), (ii) la présence « naturelle » de sites catalytiques à la surface (ou aux interfaces) des matériaux utilisés, (iii) la possibilité « d’injecter des trous » en provenance de la bande de valence des semi-conducteurs impliqués, souvent des oxydes métalliques, ayant une énergie (largement) suffisante pour réaliser des réactions d’oxydation énergétiquement exigeantes, comme c’est le cas pour l’oxydation de l’eau en dioxygène (aspect thermodynamique) et (iv), l’aisance relative d’une intégration multifonctionnelle hiérarchique nécessaire au bon fonctionnement effectif du dispositif final de conversion et stockage de l’énergie solaire. En ce sens, d’un point de vue générique, l’approche hétérogène (ou hybride) apparaît comme une technologie bien plus proche d’une mise en œuvre industrielle que l’approche homogène, qui reste un véritable défi en recherche. Cependant, cette approche pragmatique laisse en suspens un certain nombre de considérations qui sont, entre autres, liées à la durabilité (y compris le cycle de vie), à l’efficacité énergétique des dispositifs et à la toxicité des (nano-)matériaux employés. L’équipe TMS, pour sa part, fait le choix résolu et ambitieux de continuer à concentrer ses efforts sur une transduction moléculaire et supramoléculaire de l’énergie solaire (approche homogène), suivant un stratégie davantage bio-inspirée, proche des principes de fonctionnement des premières étapes de conversion d’énergie de la photosynthèse naturelle.

 

Utilisation de l’Énergie Lumineuse – Photochimie Bio-inorganique / PI : Gilles LEMERCIER

Les critères d’efficacité priment sur ceux de la durabilité, édictés pour l’énergie, lorsque des enjeux de santé publique sont concernés et qu’il s’agit, par exemple, de concevoir des principes actifs avancés (en l’occurrence photo-activables) à des fins médicales. C’est ainsi qu’à l’instar des agents de contraste paramagnétiques à base de gadolinium destinés à l’imagerie médicale ou du composé de coordination « cisplatine » utilisé en chimiothérapie anti-cancéreuse, la thérapie photo-dynamique (PDT) s’autorise le recours à des métaux semi-précieux tels le ruthénium, voire l’osmium, pour exploiter la riche photochimie de leurs composés de coordination avec des ligands oligopyridiniques et analogues (tels la 1,10-phénanthroline, phen, et ses dérivés), présentée ci-dessus dans le cas représentatif de [Ru(bpy)3]2+. Fonctionnant comme des photosensibilisateurs (PS) chimiquement inertes à l’état fondamental, leur réactivité délétère au niveau cellulaire est déclenchée lorsqu’ils sont excités par la lumière (via une fibre optique, par ex.). Les contraintes et spécifications sont nombreuses pour l’emploi de tels composés de coordination en médecine. Parmi celles-ci, outre les stratégies de ciblage des organes à traiter (« targeting »), qui nécessite une ingénierie moléculaire pour décorer les cœurs photosensibilisateurs d’éléments de reconnaissance, se pose également le problème de l’excitation des photosensibilisateur dans la « fenêtre spectrale thérapeutique », située entre 700 et 1100 nm. Cette dernière correspondant à une moindre absorption des tissus interfaciaux (cutanés ou internes) qui ont l’inconvénient de filtrer la lumière excitatrice, limitant de facto l’efficacité de la photo-excitation des photosensibilisateurs. Deux stratégies peuvent être déployées pour résoudre cette problématique, qui reposent encore une fois sur l’ingénierie moléculaire et visent cette fois-ci à moduler les propriétés optiques et photophysiques des PSs. Suivant la stratégie choisie, la photo-excitation du photosensibilisateur dans son état réactif pourra être effectuée directement dans la « fenêtre thérapeutique » (composés de l’Os(II), absorption linéaire) ou résultera d’une absorption multiphotonique à basse énergie (optique non linéaire).

Le schéma de principe de la PDT est représenté ci-dessous. Le mécanisme le plus fréquemment admis (PDT de Type II) consiste en un transfert d’énergie électronique de l’état photo-excité du photosensibilisateur (après excitation à un ou deux photons) au dioxygène (triplet dans son état fondamental) pour générer in situ l’état singulet 1O2 dont l’activité délétère non spécifique conduit à la mort cellulaire par apoptose ou nécrose. Pour des milieux appauvris en dioxygène (milieux hypoxiques), c’est un mécanisme dit « de Type I » qui prendrait tout au moins partiellement le relais par un transfert d’électrons et la génération associée d’espèces intermédiaires radicalaires carbonées tout d’abord et/ou oxygénées (« reactive oxygen species », ROS).

Projets collaboratifs en cours :

– Projet « PDT-PDAC » (Moonshot project du PEPR LUMA, https://www.pepr-luma.fr/projet/pdt-pdac/), coordonné par le Dr. Céline FROCHOT (CNRS/Univ. Lorraine) et le Pr. Vincent SOL (Univ. Limoges) et visant au développement de nouveaux PS pour un traitement du cancer du pancréas.

         

– ANRi « Target therapy » (https://anr.fr/Project-ANR-20-AMRB-0009), coordonnée par le Dr. Tony Le Gall (Inserm/Univ. Bretagne Occidentale/UBO) pour la partie française et visant à l’éradication de souches bactériennes résistantes et le traitement de la mucoviscidose par exemple.

– IRP (« International Research project ») « MAITAI » (dirigé par F. Paul – ISCRennes), « Absorbeurs Multiphotoniques en Thérapie et en Imagerie : de la photonique moléculaire aux applications bio-orientées »

Publications significatives :

(a) E. Rousset, O. Mongin, J. Moreau, L. M. Lawson Daku, M. Beley, P. C. Gros, S. Chevreux, M. Blanchard-Desce and G. Lemercier*, Molecular engineering for optical properties of 5-substituted-1,10-phenanthroline based Ru(II) complexes“, Dalton Trans., (2021), 50, 10119–10132, DOI: 10.1039/D1DT00886B. (b) R. Youf, M. Muller, A. Balasini, F. Thetiot*, M. Muller, A. Hascoet, U. Jonas*, H. Schönherr*, G. Lemercier*, T. Montier, T. Le Gall*, Antimicrobial photodynamic therapy: latest developments with a focus on combinatory strategies , Pharmaceutics, (2021), 13, 1995 (56 pp), DOI : 10.3390/pharmaceutics13121995. (c) R. Youf, A. Nasir, M. Müller, F. Thétiot, T. Haute, R. Ghanem, U. Jonas, H. Schönherr, G. Lemercier, T. Montier, T. Le Gall*, Ruthenium(II) Polypyridyl Complexes for Antimicrobial Photodynamic Therapy: Prospects for Application in Cystic Fibrosis Lung Airways, Pharmaceutics, (2022), 14, 1664 (25 p), DOI : 10.3390/pharmaceutics14081664. (d) T. Le Gall,* G. Lemercier,* S. Chevreux, K.-S. Tücking, J. Ravel, F. Thétiot, U. Jonas, H. Schönherr, T. Montier, New Ruthenium(II) Polypyridyl Complexes as Photosensitizers for Antibacterial Photodynamic Therapy: A Structure-Activity Study on Clinical Bacterial Strains, ChemMedChem, (2018), 13, 2229–2239; Hot Topics 2020: Antimicrobials, DOI : 10.1002/cmdc.201800392. (e) G. Lemercier*, M. Four, S. Chevreux, Two-photon absorption properties of 1,10-phenanthroline-based Ru(II) complexes and related functionalized nanoparticles for potential application in two-photon excitation photodynamic therapy and optical power limiting, Coord. Chem. Rev., (2018), 368, 1-12, DOI: 10.1016/j.ccr.2018.03.019.

 

Valorisation de la chimie des « carbéniums étendus » : L’éclat métallique sans le métal !  / PI : Philippe P. LAINÉ

D’un point de vue physico-chimique, il est habituel de considérer les molécules organiques pour leurs propriétés électroniques (colorants / chromophores), leurs propriétés de luminescence (fluorescence voire phosphorescence / luminophores), leur paramagnétisme ou leur réactivité, entre autres. Ces molécules peuvent être utilisées pour leurs propriétés individuelles (par ex. en milieu dilué) ou constituer les composants de matériaux moléculaires amorphes, cristallins ou auto-assemblés et de dimensionalité variable (« 2D & 3D »). Les propriétés physico-chimiques des matériaux massiques diffèrent souvent de celles des molécules constitutives et les interfaces peuvent jouer un rôle déterminant dans l’émergence de nouvelles propriétés d’intérêt. Il en est ainsi d’une nouvelle famille de métamatériaux innovants que nous avons identifiée au cours de notre développement de la chimie des carbéniums étendus (ramifiés), qui sont de puissants colorants. Ces « super-chromophores » sont capables de s’auto-assembler pour former des films (« 2D ») et des pigments (« 3D ») présentant un éclat métallique similaire à celui des métaux classiques (or, argent, cuivre…). Cet éclat (effet optique quasi-inédit) est ajustable par ingénierie moléculaire. Il est à noter que ces matériaux sont des isolants électriques (il n’y a pas d’électrons délocalisés de surface) et que le mécanisme physique à l’origine de la réflectivité, fort probablement de nature excitonique, diffère donc fondamentalement de celui des métaux (de nature plasmonique).

Cette technologie de rupture (« deep-tech ») est brevetée et une startup a été fondée fin 2020 : AURESSENS (https://auressens.com). Cette technologie vertueuse s’inscrit pleinement dans le cadre des objectifs de l’ODD No 9 (« Industrie, Innovation et Infrastructure »).

 

 

 

 

 

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